Comment réagir face à une faillite

Il y a deux façons de survivre à une faillite: broyer du noir ou se tourner vers l’avenir.

Il y a 50 ans, faire faillite, c’était honteux. Vous aviez failli non seulement à vos créanciers, mais aussi au strict code moral qui régissait la société québécoise. Encore aujourd’hui, le mot «faillite» est associé à «échec», «désastre», «catastrophe»… Dans une société qui valorise le succès et la performance à tout prix, faire faillite est une épreuve majeure.  Mais vous pouvez le voir autrement.

Chaque année, environ 25 000 Québécois déclarent faillite. Pour une majorité, cette épreuve est avant tout un soulagement. Et un enseignement. La faillite permet avant tout de se libérer de ses dettes et, souvent, de créanciers agressifs.

Pourquoi un soulagement? Car si la détresse financière dure pendant des années, la santé mentale et physique est affectée. Les experts disent que se serrer la ceinture au-delà de cinq ans pour payer des dettes, ça ne fait pas de sens du point de vue économique. Si vous n’avez pas d’actifs à protéger (vos REER et retraite d’employeur ne sont pas saisissables, sauf exception), la faillite s’impose probablement.

Techniquement, une fois que vous aurez déclaré faillite, le syndic de faillite fera directement affaire avec vos créanciers non garantis, leurs saisies-arrêts sur salaires et poursuites sont suspendues. Après un délai, le syndic vendra vos biens saisissables et liquidera vos épargnes (sauf votre REER). Le fruit de cette vente servira à rembourser vos créanciers. Pendant un certain temps, plusieurs faillis doivent effectuer des paiements excédentaires, qui représentent habituellement 50% de tout revenu net supérieur à 200$ par paye.

Puis, le syndic convoque, parfois, une assemblée des créanciers. Votre présence y est obligatoire. La loi vous obligera toutefois à assister à deux séances de formation sur les causes de votre faillite et la façon de gérer vos finances personnelles à l’avenir. Entre dix et vingt mois après la déclaration de faillite survient la «libération».

Après la faillite

La plupart des faillis envisagent différemment leur rapport avec l’argent, le crédit, l’endettement. Ils ont appris à vivre selon leurs moyens. Et, surtout, à se doter d’un budget et à le suivre.
Contrairement aux idées reçues, même si le mot «faillite» est inscrit en grosses lettres dans votre dossier de crédit pour les six prochaines années, ça ne signifie pas qu’un créancier éventuel refusera de vous faire confiance. Au contraire.

La plupart des faillis arrivent à rebâtir leur crédit après deux ans, la période minimale exigée par l’ensemble des prêteurs. Pourquoi? Une personne qui a fait faillite repart à neuf. Son ratio d’endettement tombe à zéro. Et, surtout, il est souvent traumatisé par l’expérience, ce qui peut devenir un puissant incitatif à mieux s’organiser financièrement. Cela demande toutefois d’importants changements d’habitudes de vie et de consommation, et pourrait bénéficier du soutien des proches et du conseil de professionnels pour éviter de se retrouver dans la même situation.

Malgré tout, la plupart des faillis ont de la difficulté à obtenir du crédit dans la première année suivant leur faillite. Cette situation est pénible, car il est alors difficile de se loger ou d’obtenir des services, comme l’électricité, le câble, le téléphone cellulaire…

Reprendre le dessus

Une des façons de s’en sortir, c’est d’obtenir la confiance d’un proche (le conjoint, un membre de la famille, un ami). Cette personne acceptera de servir de cosignataire ou assumera seule la responsabilité de votre compte chez le fournisseur. Cette dernière avenue n’est pas souhaitable, car elle repousse à plus tard la reconnaissance, par le bureau de crédit, de votre nouvelle probité. Un cosignataire est davantage à privilégier, ne serait-ce que quelques mois.

Après une faillite, ouvrir un nouveau compte de banque peut s’avérer ardu. L’institution gèlera probablement tous vos chèques (sauf ceux des gouvernements et votre paie) pendant quelques jours et hésitera à vous ouvrir un compte chèques.

Le meilleur moyen de rebâtir son crédit est d’emprunter à nouveau, et le plus rapidement possible ! Vous placez la somme empruntée dans un produit simple, comme un prêt REER ou un CPG. Dans le cas du CPG, l’institution financière gèlera votre placement et en conservera le certificat, à titre de garantie de prêt. Comme point de départ, il existe aussi les cartes avec garanties ou les cartes de grande surface. Si vous effectuez vos paiements religieusement, votre dossier de crédit vous permettra éventuellement d’avoir accès aux cartes majeures.  Consultez notre article pour mieux connaitre comment déterminer sa capacité d’emprunt.

La même technique peut s’appliquer à l’obtention d’une carte de crédit. La banque peut garder un montant, disons 500$, en garantie, qui correspondra à la limite de crédit de la carte. Au bout d’un an, vous pouvez demander de récupérer la garantie ou d’augmenter la limite de la carte.

Il est possible d’acheter à nouveau une maison ou un condo après avoir fait faillite, grâce à la location-achat. Cette formule permet de fixer un prix d’achat de la propriété à l’échéance du bail. Le montant versé en loyer peut ainsi être intégré en tout ou en partie à la mise de fonds. La période de location vous donnera le temps de trouver un prêteur et de lui démontrer votre sérieux, si votre loyer est toujours payé à temps. Le propriétaire-vendeur peut toutefois exiger le dépôt d’une garantie, qui pourra aussi servir de mise de fonds à l’achat de la maison. Ce dépôt devra toutefois être effectué par traite bancaire ou versé à un compte en fidéicommis d’un notaire.

Enfin, quand vous faites faillite, votre cote de crédit tombe à R9 (la meilleure cote est R1). Chaque année après la libération, si vous vous efforcez à rebâtir votre crédit, communiquez avec les sociétés de crédit Equifax et Trans-Union pour vérifier votre dossier (c’est gratuit). Les études confirment que jusqu’à 25% des de leurs dossiers contiennent des erreurs. Si c’est votre cas, communiquez avec votre institution financière et vos créanciers pour qu’ils corrigent le tir auprès des agences de crédit.

  • En cas de faillite, Hydro-Québec ne peut interrompre le courant et votre solde est ramené à zéro; si vous avez été débranché et que vous avez fait une déclaration de faillite, Hydro n’a pas le choix que de vous rebrancher; Hydro peut toutefois exiger un dépôt de garantie correspondant à deux mois de service.
  • En cas de faillite, un locateur d’auto ne peut récupérer son bien si le véhicule est essentiel au maintien du revenu de subsistance ou à la recherche d’un emploi, ou si les services de transports en commun sont jugés inadéquats.
  • Une faillite vous libère légalement de toute dette que vous aviez à la date où vous avez déclaré faillite (sauf les pensions alimentaires, un solde à l’aide sociale, un solde de prêt étudiant contracté jusqu’à sept ans avant la faillite, des amendes imposées par un tribunal ou des contraventions).
  • Vous conservez la plupart de vos meubles, vêtements et jouets.